Ruelles et tourelles à Sarlat

On ne conseille bien que ce que l’on connaît : j’ai suivi la visite guidée de la ville médiévale de Sarlat ce week-end, en touriste. Et ainsi redécouvert l’harmonieuse beauté de cette cité qu’à souvent parcourir, on pourrait ne plus regarder avec l’émerveillement de la première fois.

Le charme agit dès qu’on quitte les lieux les plus connus, pour s’engager dans une ruelle obscure en prenant de la hauteur sur les flancs d’un des “pechs”, les collines qui entourent la cathédrale, coeur de la vieille ville. Une maison de maître dévoile sa belle porte à l’encadrement sculpté, de petites échoppes bordent un étroit escalier qui n’a pas beaucoup changé depuis les venelles du Moyen Age, la propreté en plus! Et toutes ces tourelles au coin des rues, de formes plus originales les unes que les autres, à quoi bon?

Sarlat est célèbre pour la richesse de son patrimoine architectural, remarquablement préservé. Cette cité se distingue aujourd’hui des bourgs alentours par un sentiment de supériorité, une pointe d’arrogance derrière une façade aimable, alimentée par l’admiration des visiteurs du monde entier. La visite guidée révèle que cet esprit est ancré dans les murs de la cité : les riches bourgeois sarladais de la Renaissance ornaient leurs demeures de “tours de noblesse”, excroissances rappelant les donjons des châteaux féodaux alentour et dont la raison d’être était de témoigner aux yeux des passants de la réussite des propriétaires, les apparentant à l’aristocratie. Intérieurement, ces extensions souvent rajoutées sur les façades originelles ne remplissaient pas de fonction notable, au mieux un escalier distribuant l’accès aux étages, souvent des réduits trop exigus pour être aménagés. De l’extérieur cependant, ces tourelles marquaient le statut des occupants fortunés.

Le plan périgourdin classique des maisons modernes comporte le plus souvent une tourelle en L, ou un pigeonnier qui s’élève à côté de la construction principale. C’est une survivance moderne des tours de noblesse de la Renaissance et un symbole de réussite sociale, tradition sarladaise bien vivante qui a résisté à la tendance fonctionnelle de l’habitat rurbain du XXIe siècle.